LEADFOOT RIVET - Southern Echoes (2015)

Titles :

01. The Bullfrog 03:41
02. Shed My Old Skin 03:55
03. Hangover In Hanover 03:44
04. Highly Educated Fool 05:12
05. He Ain't Heavy (He Is My Brother) 05:47
06. Ghost Train 04:12
07. Slow Motion 04:24
08. Livin' With Me Sure Is Funny 04:59
09. He Is A Loner 04:26
10. Somewhere South Of Macon 04:21
11. Damned Tourists! 04:43
12. Miss Paranoia 03:49
13. Dinosaur 03:42
14. Why Lie? Need Beer! 02:24
15. The Game Of Love 08:12

Musicians :

Leadfoot Rivet: Harmonica, chant principal, guitare rythmique résonateur sur "Why lie ?, Need beer !".

Slim Batteux: orgue et piano, chant ("He ain't heavy").

Jean Paul Avellanada: guitares solo, rythmiques acoustiques et électriques, résonateur-dobro.

Stan Noubard-Pacha: guitares solo ("Ghost train"/"He ain't heavy"/co-lead on "Bullfrog" avec JP. Avellaneda).

Anson Funderburgh: guitare solo ("Highly educated fool").

Thomas Weirich: guitare rythmique et solo ("Livin"with me sure is funny!"), toutes les basses y compris fretless, guitare-sitar et toutes les mandolines.

Stéphane Avellanada: batteries et percussions.

Alex Satger & Nicole Lise: chœurs.

Voilà un album futé, d'une grande qualité et qui risque fort de ne pas connaître un succès mérité, à moins que, par le miracle du bouche à oreille, les célèbres et renommées chroniques de RTJ ne viennent sauver cet opus malicieux d'une diffusion confidentielle auprès des initiés de la secte du Grand Bleu. Vous trouvez que j'en fais trop ? Probablement, mais c'était juste pour vous préparer au ton souvent décalé et impertinent de l'artiste. En quinze tableaux, nous avons droit en effet à un nouveau volume des « Histoires de l'oncle Alain », conteur-né, esprit libre et bluesman qui nous la fait exactement comme là-bas, dis ! Ne cherchez en effet point de « franchouillardise » dans ce recueil qui respire à chaque note le blues du bayou et la musique de là-bas dans la multiple diversité de ses racines. Diction irréprochable et sans accent autre que celui d'outre-Atlantique, goût du second degré gentiment incisif si caractéristique des Américains et si peu compris ici (« Sweet Home Alabama », « Workin' for the MCA », « Born in the USA », pour citer quelques exemples connus), la voix chaude, puissante et profonde de « Leadfoot » (à peu près le même surnom que Jean-Pierre Jarier, si vous voyez ce que je veux dire…) nous emmène pour un voyage dans le Sud profond, tout le Sud, de la Géorgie au Texas, en passant par la Louisiane ou l'Alabama, et si nous n'étions pas avertis, il serait facile de croire à l'illusion d'une production locale estampillée au Bourbon. C'est que l'oncle Alain a grandi dans un milieu très musical propice à l'éclosion d'un passionné de blues, et il est aujourd'hui capable avec cet album qui fête les 40 ans de son premier effort discographique en solo (!) de nous restituer par le menu toutes les subtilités de cette musique du terroir dans laquelle notre rock sudiste trouve ses origines.

Dans cette tâche, notre conteur est bien aidé par une équipe de pointures assez familiale parmi lesquelles on remarque Stéphane Avellaneda (batteur d'Ana Popovic), ou Anson Funderburgh (leader du groupe texan Anson Funderburgh and the Rockets), sans oublier Slim Batteux qu'on ne présente plus et à qui est accordé le privilège d'un magnifique duo sur le slow « He Ain't Heavy (He Is My Brother) ». Bref, vous l'aurez compris, même si les démonstrations instrumentales à grand renfort de saturation ne sont pas vraiment mises en avant, ça dépote ferme quand il faut et ça tient solidement la route, avec énormément de feeling, un évident sens des nuances et pas mal de subtilité. Subtilité qu'on retrouve, comme je vous le disais, dans les textes, quelquefois à pisser de rire, qu'il ne faut pas forcément prendre à la lettre, comme «The Bullfrog », morceau original qui ouvre l'album, l'hommage très particulier et joyeux au divorce (« Shed My Old Skin »), le mordant et implacable « Highly Educated Fool » (joli solo d'orgue), ou encore l'adaptation en anglais de l'humoristique "Pas Un Cadeau " de Rockin' Chair (« Livin' With Me Sure Is Funny »). La couleur blues de l'album n'empêche pas le père Rivet de laisser percevoir une épaisseur moins frivole (« Somewhere South Of Macon », « Miss Paranoia » qui ajoute en outre une ambiance jazzy, ou « Why Lie? Need Beer! », ballade désespérée aux croisées de la country et du blues qui lui permet aussi de jouer avec le ternaire) et de s'autoriser quelques crochets côté country (« Ghost Train » qui file à bonne allure vers le néant de l'oubli, ou la mélancolique et désenchantée ballade country/folk/blues « He Is A Loner »), ou swing/jazz (« Dinosaur »), voire d'ajouter des couleurs gospel (« Slow Motion »). L'artiste ne peut pas non plus passer à côté d'un hommage discret à la musique d'une de ses influences majeures, Ray Charles, et son « Damned Tourists! » pétri de malice et de changements de tonalité balance gentiment. L'album se termine par huit minutes de slow-blues fleuve célébrant avec ferveur « The Game Of Love » et ses facettes, au mépris de tous les formats commerciaux. Les dernières notes tombent et on ne peut s'empêcher de se dire que ça aurait été vraiment dommage de passer à côté d'une telle galette !
Bon, vous savez ce qui vous reste à faire…

Y. Philippot-Degand

Au début des années 80, quand on écoutait les disques du groupe français Rocking Chair, on sentait déjà que « Honky Doc » Rivet (qui arpentait la route du rock depuis longtemps) avait l’Amérique dans la voix et dans la peau. Cette Amérique lointaine et mystérieuse, berceau du blues, du rock et de la « country music ». Des décennies plus tard, après l’époque Dixie Frog et bien d’autres aventures musicales, « Leadfoot » Rivet s’est taillé une solide réputation dans le monde du blues. Son dernier album témoigne de son amour pour les racines de la musique américaine. Sa voix chaude et prenante n’a pas changé avec le temps ; elle s’est même bonifiée. Quant à ses compositions, elles tiennent la route sans problème. Dès le début, « The Bullfrog » fleure bon le bayou avec ses dobros expressifs. « Shed My Old Skin » tape du côté de la country avec une guitare électrique efficace. « Highly educated fool » est un blues convaincant et inspiré avec un bon solo de gratte bluesy. « He ain’t heavy (he is my brother) », un superbe slow mélodique avec un orgue envoûtant et une guitare veloutée, nous plonge dans une ambiance à la Clapton pour le plus grand bonheur de l’auditeur. « Ghost train » (un country-rock « jumped up ») balance un solo de six-cordes collant parfaitement à ce style musical tandis que « Slow motion » (un blues gorgé de gospel et de soul) propose un solo de guitare tout en finesse. « Somewhere south of Macon » porte bien son nom et nous emmène sur les routes du Sud. Soulignons également « Miss paranoïa » (une ballade jazzy et intimiste avec mandoline, guitare acoustique et harmonica), « Why lie ? Need beer ! » (une splendide ballade acoustique avec mandoline et dobro) et « The game of love » (un slow « countrysant »). Á la fin de l’écoute, une conclusion s’impose : ce disque dégage tant d’authenticité qu’on a du mal à croire qu’il a été enregistré par un Français. Bravo Mister Rivet !

Olivier Aubry